#5 - Destin et miséricorde : ce que l’abbé Pagès ne comprend pas du Coran
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Allah veut-Il « envoyer les hommes en Enfer » ?
Réfutation du point 5 de l’abbé Guy Pagès.
Dans son ouvrage, l’abbé Guy Pagès prétend que « le Dieu de l’Islam ne veut pas que tous les hommes soient sauvés » et que, contrairement au christianisme, Dieu « veut égarer » des hommes et « remplir l’Enfer ». L’argument repose sur une sélection de versets hors contexte, isolés de toute la théologie du destin (al-qadar), et interprétés avec un regard extérieur qui méconnaît la langue arabe, la logique coranique et la tradition musulmane.
Cette lecture sélective ne représente pas l’Islam, mais une caricature théologique. Revenons donc aux faits.

1. La doctrine musulmane est explicite : Allah veut la guidance de tous les hommes
Contrairement à ce qu’affirme l’abbé Pagès, le Coran dit clairement :
« Allah veut alléger pour vous » (Coran 4:28)
« Allah veut accueillir votre repentir » (Coran 4:26)
« Allah ne veut pas l’injustice pour Ses serviteurs » (Coran 40:31)
« Allah ne fait pas de tort aux gens ; ce sont les gens qui se font du tort à eux-mêmes » (Coran 10:44)
Et surtout :
« Nous n’avons envoyé un Messager que pour qu’il soit obéi, par la permission d’Allah. » (4:64)
« Nous n’avons pas envoyé de Messager qui ne parlât dans la langue de son peuple, afin de les éclairer. » (14:4)
Si Allah envoyait les prophètes, révélait les Écritures, ouvrait la porte du repentir nuit et jour, c’est justement parce qu’Il veut guider l’humanité.
Le Coran dit encore :
« Allah veut pour vous la facilité et ne veut pas la difficulté. » (2:185)
Difficile de concilier cela avec l’accusation que Dieu « veut envoyer les hommes en Enfer ».
2. L’abbé Pagès confond deux notions fondamentales :
la Volonté divine universelle et la Volonté divine législative
En Islam, les savants distinguent deux types de volonté divine :
a) La volonté universelle (al-irâda al-kawmiyya)
C’est ce qu’Allah permet d’exister dans le monde : le bien comme le mal, la foi comme la mécréance, puisque l’homme doit être libre de choisir.
Cette volonté n’implique pas l’amour ni l’approbation, mais seulement que Dieu laisse l’espace au choix humain.
b) La volonté législative (al-irâda ach-char‘iyya)
C’est ce qu’Allah aime, ordonne, agrée : la foi, la justice, la miséricorde, le repentir, le salut.
Ainsi, quand le Coran dit que Dieu « égare », cela signifie :
Il laisse s’égarer celui qui refuse volontairement la vérité.
Ce n’est pas une prédestination à l’Enfer, mais une conséquence morale d’un choix libre.
Cette distinction existe aussi dans la théologie chrétienne, chez Thomas d’Aquin, Augustin, Luther ou Calvin. Feindre de ne pas la comprendre lorsqu’elle se trouve dans le Coran relève soit de l’ignorance, soit de la malhonnêteté.
3. Les versets cités par Pagès ne disent jamais qu’Allah veut envoyer les gens en Enfer
Lorsqu’Allah dit :
« Nous avons créé beaucoup de djinns et d’hommes pour l’Enfer » (7:179)
Le verset n’indique pas une volonté de condamner — mais un constat :
les hommes qui refusent la vérité, ferment leurs cœurs, s’endurcissent, se dirigent eux-mêmes vers la perdition. Le verset commence par :
« Ils ont des cœurs avec lesquels ils ne comprennent pas. »
Ce n’est pas Dieu qui veut l’Enfer pour eux :
c’est eux qui s’en privent de la guidance par obstination.
Ce principe est répété dans le Coran :
« Allah ne guide pas les injustes. » (2:258)
« Allah ne guide pas le menteur ingrat. » (39:3)
Ce n’est pas un refus arbitraire :
c’est la conséquence d’une injustice et d’un mensonge persistants.

4. Le destin en Islam ne supprime pas la liberté : c’est l’abbé Pagès qui l’ignore
Le Coran insiste continuellement sur :
- la responsabilité individuelle,
- la liberté du choix moral,
- la récompense liée aux actions,
- le repentir toujours ouvert.
« Quiconque le veut, qu’il croie ; et quiconque le veut, qu’il mécroie. » (18:29)
« Allah n’impose à aucune âme plus qu’elle ne peut porter. » (2:286)
Si Allah « savait » ce que les hommes feront, cela ne signifie jamais qu’Il les contraint. La connaissance divine ne crée pas l’acte.
Les chrétiens eux-mêmes affirment la connaissance éternelle de Dieu sans nier la liberté — mais Pagès s’autorise pour l’Islam ce qu’il refuserait d’appliquer à sa propre théologie.
5. L’accusation d’un « Dieu qui veut damner » est contredite par la Miséricorde divine
Le Coran répète 113 fois : « Au nom d’Allah, le Tout-Miséricordieux, le Très-Miséricordieux ».
Allah dit également :
« Ma miséricorde embrasse toute chose. » (7:156)
« Votre Seigneur s’est prescrit à Lui-même la miséricorde. » (6:54)
Allah se décrit comme :
- al-Rahmân : le Miséricordieux pour toute la création
- al-Rahîm : le Miséricordieux pour les croyants
- al-Ghafûr : le Très-Pardonnant
- al-Tawwâb : Celui qui accueille sans cesse le repentir
Si Dieu voulait remplir l’Enfer, Il ne se serait pas « prescrit la miséricorde à Lui-même ».
6. Conclusion : l’abbé Pagès projette une caricature sur l’Islam
Le procédé est toujours le même :
- Sortir quelques versets de leur contexte,
- Ignorer les centaines d’autres versets sur la miséricorde, la guidance et le salut,
- Méconnaître la distinction entre les différents types de volonté divine,
- Et conclure que « le Dieu de l’Islam veut damner les hommes ».
La réalité est exactement l’inverse :
- Allah guide,
- Allah appelle,
- Allah pardonne,
- Allah n’agrée pas l’injustice,
- Allah ne veut la perdition de personne,
- Et Allah n’égare que celui qui choisit librement de s’aveugler.
En fin de compte, c’est l’argument de l’abbé Pagès qui tombe : il repose non sur une étude honnête du texte, mais sur une stratégie polémique.


