Histoire de la Palestine #6
La Palestine à la veille de l'occupation britannique : un aperçu de la fin de l'ère ottomane
La Palestine à la veille de l'occupation britannique : un aperçu de la fin de l'ère ottomane
Dans le sixième épisode de son programme "قصة فلسطين" (L'histoire de la Palestine), le Cheikh Mohammed Elhamy qu'Allah Le Préserve explore la situation en Palestine à la fin de la période ottomane, juste avant l'occupation britannique.
Cette période est souvent abordée par les historiens pour réfuter l'idée sioniste selon laquelle la Palestine était une terre vide.
Cependant, l'objectif principal de cette analyse n'est pas de réfuter ces affirmations, mais plutôt de comprendre les points de faiblesse de la société palestinienne qui ont rendu la région susceptible à l'occupation.
Pour comprendre ce contexte, il est utile de revenir à la théorie du "عدم المانع" (absence d'empêchement) du célèbre historien Ibn al-Athir, utilisée pour expliquer la rapide expansion des Mongols dans les territoires musulmans par exemple.
Selon cette théorie, un pouvoir centralisateur excessif qui élimine les forces périphériques conduit à une fragilité où la défaite ou la disparition du dirigeant entraîne l'effondrement de l'ensemble.
L'Empire ottoman à son déclin : centralisation et influences étrangères
Cette théorie trouve un écho dans l'état de l'Empire ottoman à ses derniers jours. L'empire s'était engagé dans un processus de modernisation inspiré des modèles occidentaux et laïques, ce qui avait entraîné une concentration du pouvoir entre les mains du sultan et une bureaucratie grandissante.
Paradoxalement, cette modernisation n'a pas conduit à un renforcement de l'empire, qui a continué à subir des défaites. Cette centralisation administrative a progressivement érodé la cohésion sociale et la capacité d'auto organisation de la société palestinienne.
De plus, la fin de l'ère ottomane a été marquée par une expansion de l'influence étrangère, notamment occidentale et russe. Cette influence s'est manifestée par le soutien aux minorités religieuses, telles que les chrétiens et les juifs, en leur accordant des privilèges et en étendant leur influence.
Simultanément, cette période a vu l'émergence des idées de nationalisme arabe, initialement portées par les chrétiens arabes du Levant, ainsi que du nationalisme turc....
Contrairement à la perception actuelle, un Palestinien de la fin de l'époque ottomane se considérait avant tout comme un "Ottoman", un terme qui représentait une appartenance islamique plutôt qu'une identité ethnique turque.
Cette identité commune transcendait les origines ethniques et religieuses au sein de l'empire. Cependant, la déposition du sultan Abdülhamid II et l'arrivée au pouvoir du Comité Union et Progrès, avec sa politique de turquification et son approche plus stricte envers les provinces arabes sous Jamal Pacha, ont exacerbé les tensions et renforcé les sentiments nationalistes.
Le rôle des puissances étrangères et la Première Guerre mondiale
L'Angleterre a également joué un rôle crucial en encourageant le nationalisme arabe, notamment en la personne du Chérif Hussein de La Mecque, en lui promettant un califat arabe limité aux régions sous domination ottomane non occupées par l'Occident.
La révolte du Chérif Hussein pendant la Première Guerre mondiale a créé un front interne fragilisant l'Empire ottoman au moment le plus critique.
La défaite de l'Empire ottoman lors de la Première Guerre mondiale a laissé une société palestinienne affaiblie, ayant subi des pertes humaines, la famine et des déplacements.
La structure sociale s'est réduite à l'unité familiale, tribale et clanique, et seuls les plus riches, souvent liés à l'administration ottomane, avaient les moyens d'envoyer leurs enfants étudier dans les grandes villes.
La minorité juive en Palestine sous l'Empire ottoman : une période de tolérance
Il est essentiel de souligner la situation de la minorité juive en Palestine à cette époque. L'histoire islamique offre un exemple remarquable de traitement juste et bienveillant des minorités.
Des historiens juifs, tels que Shahin Makarios, ont reconnu que les Juifs ont trouvé sous la domination musulmane une sécurité et une protection inégalées.
L'historien Michael Winter a qualifié l'Empire ottoman, bien que sunnite et perçu comme strict, d'État éclairé qui a permis une amélioration de la condition des Juifs.
L'orientaliste allemand Carl Brockelmann a décrit l'Empire ottoman comme un refuge de liberté religieuse pour les Juifs expulsés.
Salo Baron, considéré comme le plus grand historien juif du XXe siècle, a noté que les communautés juives les plus florissantes depuis l'avènement du califat jusqu'à l'abolition des ghettos en Europe se trouvaient dans les pays islamiques, y compris l'Empire ottoman.
Ce n'est qu'avec l'affaiblissement de l'Empire ottoman et l'ingérence croissante des puissances européennes, se présentant comme protectrices des minorités chrétiennes, que la situation a commencé à évoluer.
Initialement, personne ne se souciait des Juifs jusqu'à l'émergence du sionisme en Grande-Bretagne, où les Britanniques ont vu dans les Juifs une minorité sur laquelle s'appuyer.
Jusqu'à la fin du XIXe siècle, les Juifs ne constituaient pas un problème ou une crise au sein de l'Empire ottoman. Mustafa Kamel Pacha, un leader nationaliste égyptien, utilisait même l'exemple des Juifs, qui ne se révoltaient pas et louaient l'Empire ottoman, pour démontrer la tolérance ottomane envers les minorités.
Les vagues d'immigration juive, notamment après les persécutions russes de 1881, n'ont pas eu d'impact majeur initialement, car la plupart des immigrants étaient pauvres et dépendants de la charité.
L'idée d'un danger juif était même ridiculisée à l'époque. De nombreux immigrants juifs quittaient même la Palestine pour des opportunités ailleurs.
Un tournant après 1909
Un changement notable s'est produit après la destitution du sultan Abdülhamid II en 19098 . La période d'instabilité politique a permis à des Juifs d'accéder à des postes gouvernementaux importants.
L'Empire ottoman, en manque de fonds, a commencé à négocier avec le mouvement sioniste en échange d'argent contre l'assouplissement des restrictions à l'immigration juive et la vente de terres domaniales en Palestine. Le désordre a également facilité l'achat illégal de terres.
La poursuite de l'immigration juive après la défaite russe face au Japon a amplifié ces tendances. Dans ce contexte troublé, les Juifs de Palestine ont commencé à fonder une milice armée pour protéger leurs colonies dès 1909, la première graine de la future armée israélienne.
En 1911, ils ont commencé à réclamer la reconnaissance de l'hébreu comme langue officielle.
L'engagement des Juifs aux côtés des Alliés pendant la Première Guerre mondiale contre l'Empire ottoman a conduit le gouvernement turc à prendre des mesures répressives contre les institutions juives en Palestine.
Cependant, avec la défaite ottomane, une nouvelle phase a commencé.
En conclusion, l'histoire des Juifs en Palestine sous l'Empire ottoman illustre une période de coexistence pacifique et de tolérance, qui a progressivement évolué avec l'affaiblissement de l'empire, l'ingérence étrangère et l'essor du mouvement sioniste. Même au seuil de sa disparition, l'Empire ottoman proposait aux Juifs de devenir des citoyens ottomans à part entière, mais ils ont préféré se placer sous la protection étrangère, devenant ainsi, selon les mots du Dr. El-Messiri, un instrument des puissances occidentales pour démembrer l'empire.
Il est crucial de distinguer entre les Juifs locaux, souvent méfiants à l'égard du sionisme, et les immigrants, bien que beaucoup des deux groupes aient finalement adhéré au projet sioniste.
Malgré cela, certains Juifs, y compris des immigrants, ont maintenu de bonnes relations avec leurs voisins arabes en faisant preuve de respect et de service.
L'occupation britannique a marqué le début d'une nouvelle ère, une histoire qui sera abordée dans le prochain épisode .... J'espère que cet article convient à votre site !