Dans le cadre d'une émission consacrée à la situation à Gaza et à son traitement médiatique, l'humanitaire Rony Brauman a partagé son analyse de la crise, de l'histoire du sionisme et de l'État d'Israël, ainsi que de la situation humanitaire.

Ses propos, offrent un éclairage critique sur les événements en cours et leur contexte historique et politique...


Prochainement incha Allahou Ta3ala en PDF
APPEL A L'ACTION
CTA Image

Je souhaite contribuer activement à la rédaction de la revue, à la publication d’articles et à la réalisation de livres à venir, in châ’a Allah ta‘âlâ.
Mon engagement vise à participer à l’éveil d’une Conscience Musulmane, lucide et ancrée dans son temps, face aux défis majeurs d’aujourd’hui.
J’aspire à diffuser une parole sage et apaisée, porteuse de paix, qui désamorce les tensions et participe à faire reculer l’islamophobie, le racisme et la haine sous toutes leurs formes.

JE SOUTIENS

L'État d'Israël : une Ethnocratie et la Religion comme Outil

Rony Brauman décrit l'État israélien comme une ethnocratie. Il explique que pour beaucoup de sionistes, la religion juive est plus une invocation abstraite, un rite d'appartenance, qu'une pratique ou une croyance en soi.

Se référant à l'historien Shlomo Sand, il note que l'on peut se convertir au judaïsme si l'on est religieux, mais les Juifs non-croyants constituent un groupe auquel on ne peut pas se joindre si l'on n'est pas déjà considéré comme Juif, ce qui délimite une population spécifique qu'il faut appeler une ethnie.

Il rappelle que l'État israélien dans son ensemble, depuis Ben Gourion qui voulait réduire les institutions religieuses juives à l'état de serviteurs de la nation, fonctionne sur cette base.

Évoquant son histoire personnelle, Rony Brauman mentionne que son père était un sioniste dès les années 30, impliqué dans des mouvements nationalistes juifs et ayant été instructeur militaire pour la Hagana, l'embryon de l'armée israélienne. Lui-même a grandi dans "l'évidence du sionisme". Son témoignage est donc tout ce qu'il y a de pertinent.

La Violence et la Colonisation : une Stratégie de Long Terme

Pour Rony Brauman, le conflit actuel, bien que d'une phase peut-être plus violente, s'inscrit dans une continuité historique.

Il compare la situation de la jeunesse horrifiée par ce qu'elle apprend sur TikTok au soutien de la jeunesse au Vietnam, y voyant un parallèle avec un conflit colonial, asymétrique et brutal.

Il souligne le soutien militaire crucial des États-Unis à Israël, affirmant que si les États-Unis arrêtaient de fournir des armes, la guerre "s'arrêterait en 3 jours" et que même un appel "un peu ferme de Biden à Netanyahou" (actuellement Trump) pourrait stopper les livraisons.

Il déplore une "formidable régression politique" où parler d'Israël assassin, "un constat factuel", est suspecté d'être antisémite.

Il décrit les attaques systématiques d'infrastructures civiles, comme les hôpitaux, les cimetières, les écoles et les universités.

Contrairement aux bombardements d'autres conflits, les bombes d'aujourd'hui sont guidées, ce qui signifie que lorsqu'elles tombent sur un hôpital, c'est par choix délibéré.

Selon lui, il y a bien une stratégie de destruction systématique, car "on ne peut pas dire qu'un cimetière représente un danger stratégique pour Israël or plus de la moitié des cimetières ont été détruits". La dépalestinisation passe aussi par les cimetières : effacer un peuple, totalement.

L'Objectif selon Brauman : Faire Disparaître les Palestiniens

Rony Brauman déclare donc que l'objectif israélien est de faire disparaître les Palestiniens.

Reprenant les termes d'Elias Sambar, ancien ambassadeur de Palestine à l'UNESCO, il précise que cela signifie faire disparaître "la société [palestinienne], ses structures, y compris ses conditions de vie pour qu'il ne puisse pas revenir en fait".

Il adhère à la qualification de génocide pour décrire ce qui se passe à Gaza... Les intentions déclarées, les méthodes (assassinats, conditions de vie forcées, déplacement forcé, destruction de l'habitat) sont, selon lui, suffisantes pour soutenir cette qualification d'un point de vue juridique, mais surtout du point de vue humain, cela représente un "immense carnage, cette immense gâchie".

Il souligne qu'il ne parle jamais de "guerre contre le Hamas", car ce qu'il voit est une "guerre menée contre les Palestiniens" en général, y compris en Cisjordanie.

Là aussi, les violences des colons visent à "briser le moral, décourager les gens, s'assurer que ils ils vont pas concevoir d'autres solutions à leur problème de survie que la fuite".

Une Société Israélienne en Péril

Rony Brauman observe un "glissement" dans la société israélienne, marqué par des "comportements de lyncheurs". Il cite l'exemple des rassemblements en 2014 pour assister aux bombardements de Gaza, qu'il compare aux foules qui assistaient aux lynchages de Noirs aux États-Unis. Un comportement inqualifiable.

Pour lui, cette violence exercée sur l'extérieur "retentit, elle se rabat sur l'intérieur", la société israélienne est "en train de se consumer de l'intérieur" dans une dynamique nihiliste.

Il considère que les événements actuels constituent un "tournant radical", car selon lui le "masque de civilisation démocratique israélien est tombé"....

Cette société de colons se montre pour ce qu'elle est, une "société de brutes", car la colonisation s'impose par la violence, la force, la contrainte, la torture, l'humiliation.

La colonisation en elle-même est un "grand remplacement organisé, structuré, stratégique, penser comme tel".

Il critique la politique israélienne passée et présente, notant que la politique de refus d'un État palestinien et de colonisation à outrance n'est pas l'apanage de Netanyahou, mais a été poursuivie par tous les Premiers ministres, y compris ceux décrits comme de gauche comme Ehud Barak.

Il qualifie la notion de gauche et de droite en Israël de "trompeuse" sur cette question, car la gauche aussi est coloniale. Il rappelle les propos d'Ehud Barak comparant les Arabes à des bêtes féroces dans la jungle, avec lesquelles on ne discute pas mais auxquelles on tire dessus.

Brauman dénonce l'opposition de la majorité de la population israélienne à l'acheminement de l'aide humanitaire à Gaza, rappelant la politique d'Ehud Olmert de rationnement strict des calories pour "qu'ils soi dégoûté de vivre dans cet environnement là quoi".

Solutions Politiques : Utopie d'une Part, Réalisme de l'Autre

Concernant la solution à deux États, Rony Brauman estime qu'elle est devenue irréalisable ("pas praticable"), relevant d'une "utopie plus éloignée encore de la réalité que l'utopie d'un état unique".

L'Accord d'Oslo a servi de "masque à l'accélération de la colonisation". Il considère qu'un État binational où Israéliens et Palestiniens auraient les mêmes droits est la solution "la plus humaine, la plus politique". Avec le retour des réfugiés...

Il décrit la situation actuelle comme une domination unique d'Israël sur l'ensemble de la Palestine historique, où l'Autorité palestinienne a des pouvoirs limités, comparables à ceux d'une municipalité, et est obligée d'assurer une partie de la sécurité de la force occupante. Cette situation unique est "absolument dégoûtante", d'autant que l'Autorité palestinienne est financée par l'Europe.

Il note que les leviers dont dispose l'Union européenne pour faire pression ne sont pas utilisés.

L'entreprise coloniale s'étant considérablement amplifiée, notamment en Cisjordanie, avec 700 000 colons (200 000 à Jérusalem, 500 000 en Cisjordanie) dont des dizaines de milliers sont armés et entraînés militairement, la décolonisation est désormais difficile à envisager.

Un Premier ministre qui voudrait s'engager dans cette voie risquerait un attentat, comme Rabin. Il ne pense pas qu'un dirigeant israélien soit capable de prendre une telle décision.

Soutien Occidental et Censure

Le soutien des puissances occidentales s'explique par plusieurs causes convergentes.

Israël est perçu comme un "point avancé de l'Europe occidentale", incarnant la "civilisation", la "liberté", la "démocratie" face à un Orient "complexe, obscur, voir un peu effrayant". C'est une vision limitée, islamophobe et raciste. Coloniale.

C'est aussi le point d'appui "le plus sûr" pour les États-Unis, le seul où population et gouvernement sont pro-américains.

Il y a aussi, selon Brauman, une forme "d'impensé coloniale" qui rejoint le fait qu'Israël est soutenu par d'anciens empires coloniaux et a été fondé majoritairement par des Juifs européens.

Rony Brauman a lui-même été confronté à la censure médiatique depuis le 7 octobre. En effet, sa voix n'est pas conforme à ce qui est relayé par des médias comme Cnews, BFMTV ou encore I24.

Après avoir été très sollicité pour commenter le tremblement de terre au Maroc, il a été "invité au départ et puis de moins en moins", ses invitations étant "décommandées" par plusieurs chaînes, notamment en novembre/décembre.

Il raconte l'anecdote d'avoir été désinvité d'un "Complément d'enquête" où il devait commenter un reportage sur la Ligue de Défense Juive (LDJ), une "organisation terroriste aux États-Unis", pour être remplacé par Bernard-Henri Lévy.

Cette situation participe, selon lui, d'un climat général de criminalisation de la parole pro-palestinienne....

L'ensemble de ces analyses met en lumière la gravité de la situation, ancrée dans une histoire coloniale et une dynamique de violence visant, fondamentalement, à empêcher l'existence effective d'un peuple palestinien sur son territoire.


Pour ceux et celles qui souhaitent plus d'informations sur les intentions clairement affichés d'Israël :


🔹 Décisions officielles

Le 5 mai 2025, le cabinet de sécurité israélien a validé une stratégie prévoyant l'occupation complète de Gaza. Le Premier ministre Benyamin Netanyahou a déclaré que l'armée israélienne ne se limiterait plus à des incursions temporaires, mais maintiendrait sa présence dans les zones conquises. Ce plan inclut le déploiement de dizaines de milliers de réservistes et une offensive progressive visant à déplacer la population palestinienne vers le sud de l'enclave. La distribution de l'aide humanitaire serait contrôlée par Israël, uniquement dans les zones sous contrôle militaire, sans participation directe de l'armée.

🔹 Réactions internationales

Cette décision a suscité de vives critiques à l'échelle mondiale. L'Union européenne, notamment la France, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Espagne et la Belgique, a exprimé son inquiétude face à cette occupation militaire permanente de Gaza. Ces pays ont exhorté Israël à respecter le droit international et à permettre l'accès humanitaire. Certains envisagent même de revoir leurs relations diplomatiques avec Israël.

🔹 Objectifs déclarés

L'objectif affiché par Israël est la défaite totale du Hamas. Cependant, des membres du gouvernement, notamment des ministres d'extrême droite comme Bezalel Smotrich, ont évoqué la possibilité de recoloniser Gaza et de réduire la population palestinienne par des moyens tels que l'"émigration volontaire". Ces déclarations renforcent les craintes d'une annexion de facto de la bande de Gaza.

🔹 Conséquences humanitaires

La mise en œuvre de ce plan a déjà des répercussions dramatiques sur la population civile. Selon les Nations unies, 69 % du territoire de Gaza est désormais inaccessible, et la crise humanitaire s'aggrave avec des pénuries de nourriture et de médicaments. Le contrôle strict de l'aide humanitaire par Israël est largement critiqué pour ses violations des principes humanitaires.

En résumé, les déclarations et actions récentes d'Israël indiquent une volonté claire de conquérir et d'occuper durablement la bande de Gaza, suscitant une vive inquiétude au sein de la communauté internationale.

Sources diverses : RTBF, Wikipédia, Médiapart, Le Journal de Montréal, El Pais, Le Monde, etc...


Selon Brauman, Israël part en cacahuètes...
Dans un paysage médiatique saturé de langue de bois, de relativisme moral et de silences coupables, la parole de certains résonne avec une rare netteté.