Une chasse aux écoles privées musulmanes
L’accusation d’« islam politique », souvent brandie à l’encontre des institutions musulmanes, apparaît floue et instrumentalisée.

La révélation d’une « chasse aux écoles privées musulmanes sans équivalent dans les écoles catholiques » par le ministère de l’Intérieur.
Guillaume Champeau, juriste en droit du numérique et ancien journaliste, met en lumière une politique profondément discriminatoire ….
L’argument avancé par le ministère, rapporté dans Le Monde, est que les écoles musulmanes auraient un « projet politique » que les écoles catholiques n’auraient pas. Cette justification, en elle-même, soulève de graves questions sur la liberté d’association et la présomption d’innocence.

L’audience concernant le contrat avec l’État du lycée privé musulman Al-Kindi a été le théâtre de propos accablants. Selon l’avocat Maître Guez Guez, la représentante du ministère de l’Intérieur aurait déclaré à propos du « danger » du groupe scolaire : « ils auront les manettes du pouvoir et une bonne situation ». Cette citation, glaçante, révèle une suspicion inacceptable envers la réussite des jeunes musulmans. Comment interpréter autrement cette inquiétude exprimée par l’État face à la perspective que des élèves d’une école musulmane puissent un jour occuper des positions importantes dans la société ? Cela alimente le sentiment d’une islamophobie d’État, où la simple ambition de réussite chez de jeunes musulmans est perçue comme une menace.
L’accusation d’« islam politique », souvent brandie à l’encontre des institutions musulmanes, apparaît floue et instrumentalisée. Qu’implique réellement ce terme lorsqu’il s’agit d’un établissement scolaire ? Est-ce le simple fait de dispenser un enseignement religieux dans un cadre privé, un droit pourtant garanti ? L’amalgame entre pratique religieuse et projet politique subversif semble être une stratégie pour justifier un traitement inégal ….
L’emploi du mot « entrisme » pour décrire la réussite de musulmans dans divers domaines est une autre manifestation de cette logique de haine islamophobe. Dès qu’un membre de la communauté musulmane réussit, au lieu de célébrer cette réussite comme une contribution à la société, elle est immédiatement suspectée d’arrière-pensées et de vouloir s’infiltrer subrepticement dans les institutions. Cette suspicion systémique nie l’aspiration légitime de tout citoyen à une vie meilleure et à participer pleinement à la société.

Il est éclairant de contraster cette situation avec le traitement réservé à d’autres établissements privés. En Sologne, l’ouverture d’un internat catholique privé non mixte, l’« Académie Saint-Louis », a suscité une vive polémique …. Ce projet est jugé d’« extrême droite » par des partis politiques et des syndicats, qui le décrivent comme « fondé sur les valeurs traditionalistes et donc intégristes » …. Des organisations demandent même au préfet et aux autorités de l’éducation nationale de s’opposer à son ouverture, pointant notamment la « présence de Pierre-Edouard Stérin parmi la liste des financiers de cette entreprise », un « milliardaire clairement affiché à l’extrême droite » qui aurait pour mission la « prise du pouvoir, en France, par l’extrême droite et ses alliés » ….
Bien que ce projet catholique rencontre une opposition, la nature des critiques diffère sensiblement de celles adressées aux écoles musulmanes. Ici, les préoccupations portent sur l’idéologie d’« extrême droite » et les liens avec des figures politiques identifiées …. Pour les écoles musulmanes, le reproche se concentre sur un vague « projet politique » imaginaire lié à leur identité religieuse elle-même.
La différence de traitement est flagrante. Alors que les inquiétudes concernant l’école catholique en Sologne portent sur une orientation politique explicite et des soutiens financiers controversés …, les écoles musulmanes sont visées sur la base d’une suspicion liée à leur confession et à la crainte infondée de voir leurs élèves réussir ….
Cette islamophobie qui vient d’en haut, utilisant malheureusement les outils de la justice, est une véritable honte. Elle entrave le développement d’une partie de la jeunesse française et nourrit un climat de suspicion et de division au sein de la société. Il est impératif de dénoncer ce deux poids deux mesures et de garantir un traitement équitable à tous les établissements scolaires, quels que soient leur confession ou les convictions de leurs fondateurs, tant que la loi est respectée.
