Une réponse aux erreurs de l’abbé Guy Pagès - #1 - Au Sujet de Dieu - Réfutation d’un discours théologique biaisé
Introduction
Dans un texte où il prétend répondre à la question « Avons-nous le même Dieu ? », un abbé catholique, Guy Pagès, avance plusieurs affirmations au sujet de l’islam et de sa conception de Dieu. Le passage, rédigé dans une tonalité clairement hostile, repose sur des approximations graves et des contresens majeurs. Loin de s’inscrire dans un débat théologique sérieux, il s’agit d’une construction idéologique visant à exclure l’islam de la famille abrahamique.
Cet article propose une réponse posée, rigoureuse et argumentée.

1. La première erreur : réduire l’islam à deux phrases
L’abbé affirme que la théologie musulmane se résumerait à :
« affirmer que Dieu existe et qu’Il est unique ».
Une telle réduction est non seulement fausse, mais relève de la caricature.
La Foi, Croyance Musulmane (‘aqida) est d’une richesse immense : elle comporte des dizaines de chapitres portant sur :
- les Noms et les Attributs divins (Science, Volonté, Vie, Puissance, Parole, Eternité, etc…),
- la Révélation, son mode de descente, sa préservation,
- la fonction Prophétique, l’infaillibilité des messagers, leurs miracles,
- les anges, le monde invisible, la résurrection, le jugement,
- la sagesse du décret divin,
- les finalités de la création,
- la nature de la Foi, ses degrés, ses œuvres,
- La Proximité avec Allah dans la Prière, la Prosternation,
- L'acceptation des Invocations,
- et bien plus encore.
Dire que l’islam « ne fait que dire que Dieu est Un » revient à dire que le christianisme « ne fait que dire que Jésus est amour ». C’est un slogan, pas une analyse.

2. La deuxième erreur : inventer un islam qui dirait que Dieu est inconnaissable
Le texte affirme ensuite :
« l’islam enseigne que Dieu est inconnaissable ».
C’est l’inverse exact de la réalité.
L’islam enseigne de manière centrale que :
- Dieu Se fait connaître à l’humanité,
- à travers Ses Noms, Ses Attributs, Ses Actes,
- mais aussi par Sa Parole révélée, le Coran,
- et par l’envoi de prophètes chargés de transmettre Sa guidance.
Aucun courant orthodoxe de l’islam n’enseigne que Dieu est inaccessible.
Au contraire, la tradition islamique repose entièrement sur la possibilité pour l’humain de connaître Dieu, d’aimer Dieu et de cheminer vers Lui.
Affirmer le contraire relève d’une méconnaissance totale des fondements même de l’islam.
3. La troisième erreur : prétendre que le Coran ne peut pas être la Parole de Dieu
L’abbé conclut que :
« le Coran n’est pas la parole de Dieu ».
Il ne s’agit plus ici d’une analyse, mais d’une pétition de principe :
pour justifier que musulmans et chrétiens n’adorent pas le même Dieu, il faut absolument nier l’authenticité du Coran.
Pourtant, d’un point de vue strictement théologique, ce raisonnement pose trois problèmes :
a) L’islam affirme explicitement que Dieu parle
Le Coran dit qu’Allah a parlé :
- à Moïse,
- à Jésus,
- à Muhammad ﷺ,
- et à d’autres prophètes.
Ce n’est donc pas un Dieu silencieux mais un Dieu qui se révèle.
b) Dire que Dieu ne peut parler qu'une seule fois est contraire au christianisme
Si l’argument était valide, il faudrait aussi :
- nier la Torah,
- nier les Prophètes,
- nier les Évangiles,
- voire nier les lettres de Paul.
Car toutes sont considérées, d’une manière ou d’une autre, comme inspirées.
Si l’existence d’un texte révélé différent du sien prouvait que Dieu est « autre », alors le judaïsme et le christianisme n’auraient pas le même Dieu non plus.
L’argument s’effondre donc sur lui-même.

4. La quatrième erreur : Confondre connaissance de Dieu et adhésion à une théologie particulière
L’abbé affirme que pour connaître Dieu il faut reconnaître :
- la Trinité,
- l’Incarnation,
- la divinité du Christ.
C’est une position parfaitement chrétienne, mais pas un critère universel.
En appliquant ce principe :
- les prophètes de l’Ancien Testament ne connaissaient pas Dieu,
- Abraham, Moïse, David, Noé n’adoraient pas le « vrai » Dieu,
- et le christianisme serait le premier monothéisme authentique.
Or, même le christianisme ne soutient pas cela.
Le Concile Vatican II affirme explicitement que :
les musulmans adorent le même Dieu unique que les chrétiens,
Celui d’Abraham.
L’abbé se retrouve donc en contradiction frontale avec son propre magistère.
5. La cinquième erreur : instrumentaliser la question du “même Dieu” pour exclure l’islam
Le cœur du texte cherche à prouver que :
« Chrétiens et musulmans n’ont pas le même Dieu ».
Mais historiquement :
- les chrétiens reconnaissent le Dieu d’Abraham,
- les juifs reconnaissent le Dieu d’Abraham,
- les Musulmans reconnaissent le Dieu d’Abraham.
Refuser cette évidence uniquement pour l’islam relève non d’un raisonnement, mais d’une posture idéologique.
C’est un monothéisme sélectif :
- le juif : oui, même Dieu ;
- le chrétien : évidemment ;
- le musulman : non, car cela lui donnerait une légitimité spirituelle.
Le texte ne cherche pas à comprendre : il cherche à exclure.

Conclusion : une théologie construite pour disqualifier l’islam, non pour dialoguer
Le point 1 analysé ici :
- méconnaît profondément la théologie musulmane,
- repose sur des confusions logiques,
- contredit l’histoire du christianisme primitif,
- et s’oppose au positionnement officiel de l’Église catholique.
Il ne s’agit pas d’un questionnement sincère, mais d’un discours visant à présenter l’islam comme un « autre Dieu », pour mieux le délégitimer.
En réalité, chrétiens et musulmans divergent sur la nature de Dieu, Ses attributs, et Sa manière d’entrer en relation avec les hommes — mais ils adorent tous deux le Dieu unique, créateur, transcendant et miséricordieux d’Abraham.
C’est ce que reconnaissent les théologiens sérieux, tout au long de l’histoire.
Opposer artificiellement ces deux monothéismes ne relève pas de la foi… mais de l’hostilité.
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Concernant l'extraordinaire ignorance de l'abbé Guy Pagès j'aimerais remémorer une confusion, chez lui, qui semble tenace :
On perçoit également, dans son texte, une confusion majeure entre deux notions pourtant fondamentales en théologie : la connaissance de Dieu et la possibilité de Le « cerner ». L’abbé Pagès semble en effet supposer que si l’Islam refuse tout anthropomorphisme — refus partagé d'ailleurs par la tradition juive et par une partie de la théologie chrétienne — alors il enseignerait un Dieu lointain, abstrait, et en définitive inconnaissable. Cette conclusion révèle une incompréhension profonde de la Foi Musulmane.
En Islam, Dieu ne peut être assimilé à aucune créature, et aucune représentation humaine ne peut Le contenir ou Le traduire fidèlement. C’est un principe de transcendance : « Rien ne Lui ressemble » (Coran 42:11). Mais cette transcendance absolue n’implique nullement une absence de connaissance. Au contraire, l’Islam affirme que Dieu Se fait connaître aux humains à travers :
- Ses Noms (al-Asmâ’ al-Husnâ),
- Ses Attributs (Sifât),
- Ses Actes, Sa Proximité avec les Pieux,
- Sa Révélation,
- et l’envoi de Prophètes qui expliquent et incarnent la guidée.
Autrement dit : Dieu est connaissable, mais Il n’est pas cernable. Les savants musulmans l’expriment depuis des siècles : nous connaissons Dieu selon ce qu’Il nous a révélé de Lui-même, mais nous ne pouvons Le mesurer, Le décrire par analogie humaine, ni prétendre à une compréhension exhaustive de Sa réalité.
Ne pas cerner Allah ne signifie donc pas ne pas Le connaître. Cela signifie simplement reconnaître que la créature, limitée, n’embrasse jamais l’Essence du Créateur dans sa totalité. C’est une distinction théologique fine, évidente pour toute personne familière de la pensée musulmane, mais totalement absente de l’analyse de l’abbé Pagès. En gommant cette nuance, il transforme la transcendance divine en un éloignement, et l’absence d’anthropomorphisme en impossibilité de connaître Dieu, ce qui est l’exact contraire de la position islamique.
Sa critique repose ainsi non sur la doctrine réelle de l’Islam, mais sur une projection : il confond la transcendance avec l’inconnaissabilité, et l’humilité théologique avec une ignorance supposée. Cette erreur conceptuelle fausse son raisonnement dès le départ et le conduit à une conclusion erronée : un Dieu qui ne serait pas « humanisé » deviendrait automatiquement un Dieu inconnaissable.



